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ORTHOPHONISTE LE JOUR, ECRIVAIN LA NUIT.
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15 juillet 2011

Forum Amelie Nothomb 2005

A lire! Savoureux! J'ai adoré!!!

Un petit article de quelqu'un qui arrive a mieux expliquer ce livre que moi!

Novissima Verba d’Eric Guillotte : veni, vidi, vici
Eric Guillotte publie un premier roman brillant, où la trame s’apparente à l’écriture : tragique mais directe, poignante mais subtile.

Il est « le plus grand veinard qu’il ait jamais eu l’occasion de connaître ». La preuve, c’est sa vie. On en suit les évolutions au fur et à mesure que son esprit déroule le fil de son enfance, de son adolescence puis des quelques années qu’il passe dans le monde adulte. On ne sait pas son nom, mais on sait qu’il ne veut « suivre la loi qu’à sa guise ». Il est un peu cliché quand il dit qu’on n’est « pas né pour se faire chier », mais il rattrape le coup en avouant qu’il sait bien que le « no règles land » n’existe pas. Petite frappe ou psychopathe, grande intelligence ou inconscience totale, rebelle ou débile, on ne sait pas qui est ce gars qui raconte vols, cambriolages ou meurtres avec la même intensité désinvolte, le même flegme imaginatif qu’il a quand il décrit le moment où il croise la femme de ses rêves. Alors il emmène « sa princesse » dans une maison qu’il veut transformer en « château » pour celle qu’il sent être « la passion de sa vie ». Parce qu’il fallait bien qu’il y ait du sexe et du romantisme, quand même.

Et si « sexe » et « romantisme » n’étaient que viol et enlèvement ? Et si ce type, qui se dit titulaire d’une maîtrise d’histoire, n’était qu’un simple d’esprit complètement frappé ? D’après sa mère, qui donne sa version des faits, c’est plutôt ça. Un gamin faible et sans intérêt, né d’une alliance entre une mère au passé incestueux et un père tiraillé entre le Tiercé et les deux boulots qu’il fait pour gagner péniblement sa vie. Un prématuré qui se transforme en un petit monstre agressif, insupportable, qu’on balance à la maternelle puis dans une agence de déménagement pour en être débarrassé. Qui devient un gaillard réputé pour sa violence, ignorant sa mère ravagée par les soucis et son père, devenu légume après une chute du toit… ou un accident de voiture- on ne le saura jamais. Un dur de dur qui castagne les têtes de ceux qui l’emmerdent contre les bagnoles, ou viole et étrangle les filles qui résistent à son charme. Le tout, sans vraiment réaliser ce qu’il fait, tant son handicap mental est lourd.

Et si ces viols et meurtres n’étaient que purs fantasmes émanant d’un esprit ankylosé par un détonant mélange de médicaments et d’alcool ? Et si cette mère, qui dit avoir été violée durant son enfance par trois hommes de sa famille proche, n’était qu’une mythomane paranoïaque ? Et si c’était elle qui avait poussé l’échelle sur laquelle se tenait son mari, le faisant chuter du haut du toit ? Le légume qu’il est devenu peut encore entendre, réfléchir et se souvenir. Et raconter. Et il se remémore, lui, cette jeune fille timide qu’il a épousée, cette jeune femme timorée se libérant vulgairement sous l’emprise de l’alcool, cette jeune maman ne voulant pas de ce bébé qu’elle avait déjà négligé durant sa grossesse. Il se rappelle le gamin maladif, la tête de Turc des autres élèves, le pauvre gosse, pas très malin, pas très bavard, qu’il a élevé, difficilement, avec le peu d’argent qui lui restait après que sa femme ait tout dilapidé en alcool et en tiercé. Puis l’accident, qui le laisse impuissant, une douleur intolérable, « une impossibilité de se supprimer quand on a tant envie de mourir ».

Et la fin. Comme le début. Les deux orifices, « béants et sombres », le fusil. En face de quel visage, tenu par quelles mains, pour quels motifs réels ? Qui dit vrai, qui est lucide, qui a compris quelque chose à la vie de l’autre, qui doit mourir, qui a le plus souffert et fait souffrir? Le fils voit sa vie défiler, comme « une sorte de connexion étrange entre ma perception visuelle et ma mémoire ». Et le lecteur voit ce livre défiler, comme une sorte de connexion étrange entre un miroir et le reflet qu’il donne de la vie brisée de ce trio infernal.

Forum Amelie Nothomb 2005

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